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Intensification de la concurrence : seule option pour inverser le déclin tranquille du Canada

Mercredi 16 novembre 2022

 

Montréal – Une étude dévoilée aujourd’hui par le Centre sur la productivité et la prospérité – Fondation Walter J. Somers (CPP) jette un éclairage nouveau sur la nature du problème de productivité qui plombe la croissance de l’économie canadienne. Selon les chercheurs de HEC Montréal, l’intensité de la concurrence au pays serait tout simplement insuffisante pour générer les incitatifs nécessaires à stimuler la compétitivité des entreprises.

 

« En raison de la dispersion et de la segmentation géographique de l’économie, les entreprises canadiennes se sont historiquement développées dans de petits marchés intérieurs, enclavés à l’échelle des provinces, et protégés par des administrations qui estimaient que la concurrence étrangère représentait une menace pour une économie de petite taille comme celle du Canada. Faute d’être exposées à des forces concurrentielles importantes, les entreprises n’ont pas acquis les bons réflexes en matière d’investissement et d’innovation pour accroître leur productivité. »

Robert Gagné, directeur du CPP

 

Mal outillées sur le plan de la compétitivité, les entreprises canadiennes ont rapidement été dépassées par les évènements lorsque l’intégration des marchés s’est intensifiée au début des années 2000. « Depuis, on assiste au déclin tranquille du Canada, précise le directeur. Alors qu’en 1981 le pays détenait une avance de près de 2 000 $ par habitant sur le niveau de vie moyen au sein des principales économies occidentales, le Canada affichait un retard d’approximativement 7 000 $ sur cette même moyenne en 2021, – les données ayant été corrigées pour tenir compte de l’inflation et des différences de pouvoir d’achat des devises. Et si rien n’est fait pour réaligner la trajectoire empruntée par son économie, le pays risque de chuter en queue de peloton d’ici 2060 selon des projections publiées dans le dernier budget du gouvernement du Canada. »

 

Des politiques d’une autre époque

De l’avis des chercheurs, ce déclin est essentiellement imputable à l’inaction des administrations qui se sont succédé à la tête du pays depuis le début des années 1990. Incapable de se défaire de son passé protectionniste, le Canada n’a pas su préparer ses entreprises en prévision de l’intégration des marchés mondiaux. « Alors que la donne changeait progressivement à l’international, le gouvernement fédéral est demeuré ancré dans une logique où il estimait nécessaire de favoriser la croissance de la taille des entreprises et de protéger leurs emplois, explique Jonathan Deslauriers, coauteur de l’étude et directeur adjoint au CPP. Résultat : plusieurs des institutions qui encadrent et régissent la concurrence au pays tendent aujourd’hui à limiter les forces de la concurrence plutôt qu’à les stimuler, un comportement qui va non seulement à l’encontre de l’intérêt des consommateurs, mais qui réduit aussi le potentiel de croissance de l’économie canadienne. »

Pour illustrer leurs propos, les chercheurs réfèrent notamment au processus d’évaluation de la proposition d’achat d’Air Transat par Air Canada en 2019. Alors que les instances canadiennes ont ouvertement appuyé la transaction en estimant que la consolidation de ces entreprises préserverait des emplois et que le contrôle de l’État suffirait à protéger les consommateurs, la Commission européenne s’y est plutôt opposée en estimant que la création d’un géant du transport en provenance et en partance du Canada irait à l’encontre de l’intérêt des consommateurs européens.

 

« L’exemple peut paraître anodin, mais il témoigne concrètement de l’absence d’une culture de la concurrence au Canada. Alors que les institutions européennes visent à préserver l’intégrité de la concurrence afin de protéger les consommateurs, les institutions canadiennes encadrent plutôt la concurrence de manière à protéger les entreprises et les emplois existants, une stratégie particulièrement mal avisée pour une économie en mal d’innovation qui se trouve de surcroît aux prises avec un sérieux problème de rareté de main-d’œuvre. »

Jonathan Deslauriers, directeur adjoint au CPP

 

Une œuvre inachevée

En retraçant l’histoire de la gestion de la concurrence au Canada depuis la Confédération, le rapport démontre que la plupart des enjeux de concurrence actuellement observés ont clairement été identifiés dans le cadre des travaux de la Commission MacDonald au début des années 1980. « Non seulement les enjeux ont été identifiés par la Commission, mais des solutions viables ont été proposées pour améliorer la compétitivité de l’économie canadienne. Malheureusement, les pouvoirs publics n’ont retenu que la seule nécessité de conclure un accord de libre-échange avec les États-Unis », déplore le Robert Gagné.

Depuis, les accords de libre-échange se sont multipliés, mais sur le fond, le problème est demeuré entier. « À défaut d’avoir entrepris les réformes qui s’imposaient, les entreprises canadiennes ont continué de se développer dans un environnement institutionnel qui relève d’une autre époque en accordant très peu d’importance aux forces de la concurrence », poursuit le directeur.

Pour inverser la tendance et mettre fin au déclin tranquille du Canada, les chercheurs recommandent au gouvernement de s’attaquer au fossé qui sépare la stratégie de développement économique du pays des politiques publiques en matière de concurrence. Parmi les nombreux chantiers de réflexion qui attendent le pays, ils suggèrent de prioriser les enjeux qui freinent le développement d’un marché intérieur fort et résilient en s’attaquant notamment aux enjeux réglementaires qui plombent les échanges interprovinciaux, mais en assurant également un contrôle plus rigoureux de la gestion de la concurrence sur le territoire. « Les gouvernements auront beau multiplier les ententes commerciales, la croissance économique au Canada demeurera insuffisante pour préserver le niveau de vie des Canadiens si rien n’est fait pour accroître la compétitivité de leur économie », conclut Robert Gagné.

Pour en savoir plus

Rapport Retard de productivité du Canada : Et si la réponse se trouvait du côté de la concurrence?

Communiqué de presse en anglais

 

À propos du Centre sur la productivité et la prospérité – Fondation Walter J. Somers

Le Centre sur la productivité et la prospérité – Fondation Walter J. Somers mène une double mission. Il se consacre à la recherche sur la productivité et la prospérité en ayant comme principal sujet d’étude le Québec. De plus, il veille à faire connaître les résultats de ses travaux par des activités de transfert et d’éducation.

Centre sur la productivité et la prospérité – Fondation Walter J. Somers

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À propos de la Fondation Walter J. Somers

En hommage au fondateur du Groupe Walter, la famille Somers a mis sur pied la Fondation Walter J. Somers. À travers différents dons, la Fondation perpétue l’héritage familial d’engagement envers la communauté et contribue à la prospérité de la société québécoise, d’abord en veillant à améliorer sa productivité, mais également en appuyant l’excellence dans l’éducation des jeunes.

 

Source

Liettes D'Amours
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